Festival de bons mots entre Hollande et
Sollers à l'Élysée
Source AFP
16/02/2017,
Le Point.fr
Ce fut un
grand moment culturo-mondain à l'Élysée, de ceux qui
ont dû égayer le morne quotidien du « spectre » du château :
l'écrivain Philippe Sollers s'est vu épingler au revers de son veston par François
Hollande l'ordre national du mérite 20 ans après que Lionel Jospin, Premier
ministre, l'a fait officier. « Vous vous méfiez
de tous les pouvoirs et vous avez pensé que le mien, s'achevant dans quelques
semaines, vous permettait de ne rien risquer », s'est amusé le chef de
l'État devant une quarantaine de personnalités venues pour la plupart du monde
des lettres, académiciens ou compagnons de route des éditions Gallimard.
Dans un clin
d'oeil, « sans lien avec l'actualité »,
François Hollande a rappelé que son hôte n'avait « jamais repris l'usine
de casseroles » familiale.
Le président,
adepte du mot d'esprit, a emprunté à son hôte cette formule : « Celui
qui ne sait pas rire n'est pas pris au sérieux. » Se souvenant que Sollers
écrivait des billets dans la presse, il a déploré que ce ne soit plus le
cas : « Maintenant, ce sont des humoristes qui ont pris votre place,
ceux qui le sont officiellement et ceux qui l'ignorent officieusement », a
lancé François Hollande, décidément en verve.
« France
moisie »
Puis, plus
sérieux, le chef de l'État a rappelé qu'en 1999 Sollers signait une tribune
restée fameuse : « La France moisie ». Elle avait déchaîné les
« critiques de ceux qui s'y étaient reconnus, ceux qui cultivaient
« la détestation (...) des Allemands, des Anglais, des juifs, des Arabes,
des étrangers en général, de l'art moderne, des femmes trop
indépendantes ». « Cette idéologie, nous la reconnaissons, elle est
là, elle est aux portes, c'est une crispation identitaire, la mise en scène du
déclin », a-t-il enchaîné dans une allusion à la montée des populismes et
du Front national.
Philippe
Sollers, 80 ans, soit, selon ses calculs, « 42 millions de minutes et 43
milliards 200 millions de battements de cœur », a déclaré : « je ne
suis pas du tout d'avis que cela finisse. » Puis il s'est souvenu de son
enfance bordelaise quand il écoutait clandestinement Radio Londres et ses
messages personnels et poétiques : « J'aime les femmes en bleu, je
répète, j'aime les femmes en bleu. »
Sous les ors
de l'Élysée, il a rendu hommage aussi à François Mitterrand, « président
de la République bien inspiré » qui avait voulu se « faire le
propriétaire » des Essais de Montaigne, tenant l'ouvrage dans sa
main sur sa photographie officielle. « Je continue et j'ai une foi
définitive, absolue, dans la
littérature », a conclu l'auteur au côté de son épouse Julia Kristeva.
(AFP)
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