Philippe Sollers

INTERVENTION

1. De Gaulle : Votez Sollers !
2. Documents : De Gaulle, Malraux, Mao, Jean XXIII (à partir de 05:12)

 

De Gaulle : Votez Sollers !

(Message intergalactique du 13 octobre 2013) 

 

   De Gaulle fumait-il des joints ? C’est très probable, comme le prouve cette carte d’André Malraux à la parution, en 1973, de mon roman H. Il y a là une révélation étonnante d’un spécialiste de la vision imaginaire de l’art.

   Cette révélation est d’autant plus importante que, avec la montée actuelle du Front national, on a pu voir Florian Philippot ne pas hésiter à se dire « gaulliste ». Il avait les lèvres pincées de celui qui, visiblement, ne s’est jamais défoncé. La confusion est donc à son comble et pousse dans le même sens, partout, vers la falsification généralisée de l’histoire. On demande à Florian Philippot où se situait Le Pen pendant la guerre d’Algérie. Il répond : « Je n’étais pas né. » J’en profite, une fois de plus, mais personne ne m’écoute, pour rappeler que c’est grâce à Malraux que j’ai été libéré des hôpitaux militaires de l’époque, après trois mois d’enfermement, terminés par une grève de la faim. (« Réformé numéro 2, sans pension, pour terrain schizoïde aigu. ») Comme l’a dit une fois Aragon, avant de se faire instrumentaliser par la police stalinienne : « J’ai conchié l’armée française dans sa totalité. » (Traité du style)

   Depuis l’au-delà, de Gaulle et Malraux m’ont téléphoné à Venise, en s’inquiétant beaucoup du dernier livre d’Alain Finkielkraut, L’identité malheureuse, livre glorieusement présenté avec photo emphatique de l’auteur, en couverture du Point, avec cette question : Peut-on encore être français ? Ils m’ont demandé l’un et l’autre, avec des voix chargées de substances difficiles à identifier, de réagir. De Gaulle lui-même : « Enfin, Sollers, remuez-vous, vous qui êtes l’exemple du trésor national de l’identité heureuse. Je vous ai fait envoyer de l’excellent afghan, que vous avez fumé, comme moi, intensément, à l’époque. Vive la France ! Je vais lire aussitôt votre prochain roman Médium, qui paraît début janvier, et dont, déjà, mon génial ami Malraux me dit qu’il est excellent. Vive l’identité heureuse ! Et à nouveau : Vive la France ! »

  J’étais à peine étonné, ce soir, mais, après cette interlocution stellaire, je crois que je vais dormir.

 

Philippe Sollers

Venise, dimanche 13 octobre 2013,  18h43

 

 

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